A Retromobile...
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Renault Fuego Turbo "USA"."
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Renault met le feu!"
Les coupés populaires ont la cote en Europe dans les années 70, la vague GTi y mettra un terme soudain au cours des années 80. Chez Renault il est temps de remplacer les vieillissantes R15/17 basées sur la R12 et c'est la R18 qui servira à mettre au point le nouveau coupé présenté en 1980, la Fuego. D'ailleurs on la retrouve en filigranes les lignes douces de la R18. Pourtant en les mettant côte à côte, aucun véritable rapport.
La Fuego est moderne et bien ancrée dans les années 80, son dessin en revanche s'inspire beaucoup de celui de la Porsche 924 apparu en 1976. Mais je mettrais ceci sur l'époque et le courant stylistique car en détaillant les deux voitures, elles ont au final peu de traits vraiment communs. Avec ses boucliers en plastique, le coupé au losange nous embarque dans les "eighties" où le chrome est ringardisé. L'avant incliné se passe de phares basculants et d'originales décorations latérales en plastique noir striées soulignent la partie située entre le capot et les ailes avant, on s'y est tellement habitué que l'on n'y prête même plus attention!
De profil, les surfaces vitrées importantes apportent de la luminosité bienvenue dans l'habitacle, un pli de carrosserie au milieu de la caisse allège visuellement le profil qui se passe ainsi de baguettes latérales. Le hayon avec sa bulle typique très appréciée à l'époque signe aussi le look de la Fuego, là encore il tire un trait sur les R15 et 17 qui proposaient une poupe toute autre. C'est aussi à cet endroit que l'on retrouve le pendant des moulures latérales striées qui débutent à l'avant, ici est placé le cartouche de la version suivant les niveaux de finitions.
Cette décoration ceinture l'arrière et s'insère entre la bulle et les feux, c'est aussi à cet endroit que l'on trouve le plus de traits communs avec le coupé de Stuttgart.
A bord, l'ambiance est typique de ce que Renault propose à cette époque, un ensemble classique, austère et rationnel mais qui n'a pas pour objectif de faire rêver la clientèle avec des gadgets innovants. En revanche c'est confortable, accueillant et spacieux, quand à la finition, si elle n'a rien d'exceptionnelle, elle n'est pas pire que sur les autres modèles Français de la même époque.
Populaire, voilà peut être ce qui va lui causer du tort car au départ, ce sont des moteurs bien timides qui seront mis au catalogue, un 1397 Cc de 64 chevaux et un 1647 Cc de 96 chevaux en haut de gamme, ce qui était bien peu pour un coupé si aérodynamique et se donnant des allures de grand tourisme.
Il faut attendre 1981 pour voir enfin des modèles passer la barre symbolique des 100 chevaux avec la GTX de 110 chevaux et son bloc de 1995 Cc.
Côté ventes, elles sont correctes malgré tout, du moins au départ car la mode des coupés bon marché périclite, les GTi s'installent et offrent le grand frisson dans des modèles plus discrets, plus compactes, plus polyvalentes et surtout très "branchouille".
En 1983, Renault essaye une idée osée qui pourtant aura de l'avenir, un bloc diesel sur son coupé! Ce moteur 2068 Cc épaulé par un turbo (ouf!) affiche 88 chevaux et est capable de 175 Km/h. Sur le papier, elle tient la route mais à cette époque, ces mécaniques bruyantes et vibrantes se montrent peu en adéquation avec une carrosserie exclusive, de plus les mentalités étaient peu ouvertes à ce type d'union, ses ventes resteront marginales.
L'année suivante en 1984 la Fuego s'offre un relooking. En Europe les ventes de ce type de voitures se sont effondrées et Renault va tenter de terminer la carrière de la Fuego dans les conditions disons, les moins pires possibles. Le style extérieur évolue très peu, la calandre est légèrement modernisée et les boucliers sont aussi timidement retouchés, c'est quasi imperceptible pour les clients. Seule la planche de bord à large visière transforme l'habitacle. Le tout à moindre frais car pour la partie basse et la console centrale, c'est bonnet blanc et blanc bonnet!
Les moteurs sont légèrement revus mais la véritable nouveauté concerne l'entrée au catalogue de la version sportive turbo essence. Voilà enfin le vrai coupé grand tourisme que beaucoup espéraient au départ. Son moteur est un 1565 Cc qui affiche 132 chevaux, le tout bien sûr faisant appel à une technique éprouvée chez Renault, l'escargot magique, le bien nommé turbocompresseur. Il s'agit du bloc monté sur la R18 mais dont la puissance a été grandement augmentée grâce à une pression plus élevée du turbo. Avec 200 Km/h en vitesse maxi et le kilomètre départ arrêté en 31 secondes, voilà une Fuego qui offre enfin de véritables sensations...sauf qu'une petite R5 GT Turbo en offre plus pour moins cher!
Alors pour faire passer la pilule, on lui offre une présentation flatteuse, des jantes alliage "BBS" à nid d'abeilles, des stickers "turbo" sur la lunette arrière ainsi que sur les bas de portes et des feux longue portée.
A bord équipement luxueux avec sièges "pétales" en velours, volant en cuir, instrumentation riche, vitres électriques, fermeture centralisée et combiné radio format minichaîne (en option) qui pour certains clients étaient un facteur décisif d'achat!
Cet excellent coupé offre de belles prestations, rapide, spacieuse, confortable et bien équipée, elle se montre plaisante à conduire et saine, freinage à disque sur les 4 roues. Mais au milieu des années 80 l'Europe à choisi, les coupés populaires sont oubliés pour laisser place aux petites compactes sportives. La Fuego quitte en 1985 le catalogue et deviendra vite une voiture de ringards, triste épilogue. Au total, Renault en aura vendu plus de 265.000 exemplaires, ce qui n'était pas si mal que ça au final.
Mais c'est oublier que Renault est présent à cette époque aux Etats-Unis et croit encore dur comme fer qu'il peut se faire sa place à l'instar des marques Japonaises où Allemandes, raté! Pourtant la gamme est riche, Alliance, Encore, R5, la Fuego peut y arriver, elle n'est pas plus ridicule que ces coupés Japonais qui se vendent en masse sur le nouveau continent. Fabriquée à Maubeuge, la Fuego débarque par bateau dès 1982 en Amérique. Aidé par son réseau "AMC", la Fuego est bien visible et la publicité vante ses performances et son dynamisme. En revanche il faudra sacrément la modifier pour qu'elle réponde aux douloureuses normes d'outre Atlantique. Les boucliers sont spécifiques et doivent absorber un choc jusqu'à 8 Km/h, les phares et feux sont eux aussi dédiés à cette version qui possède aussi un bouclier arrière plus épais et des feux de position latéraux insérés dans les ailes avant et arrière. Plus subtil, un éclaireur de plaque noir est positionné en haut du panneau arrière, sur la version Française, ils sont incorporés au pare-choc.
La version haut de gamme Turbo reçoit une décoration inédite avec de fins filets argentés et un lettrage différent en bas de portes et sur le hayon, elle est du coup plus discrète et bourgeoise. Les jantes aux pneus Michelin TRX sont spécifiques également.
A bord on a mis le paquet, de nombreuses options rendent la Fuego Turbo presque luxueuse, climatisation, toit ouvrant en toile électrique et surtout cette incroyable sellerie en cuir reprenant le motif du losange, génialement kitsch!!
Mais au pays des paradoxes, on vends du carburant au prix de l'eau mais on catalyse très tôt. Ainsi la version Turbo ne délivre plus que 107 chevaux chez l'Oncle Sam.
Finalement, la Fuego se fait une petite place en Amérique du nord, Canada inclus. Elle se vendra à 41.460 exemplaires en trois années, ce qui est pas mal comparé au nombre total de Fuego vendues sur la planète, soit 265.367 modèles en tout. Renault envisager d'y lancer un cabriolet pour remplacer l'Alliance, Heuliez lui donne vie mais finalement le cabriolet Fuego ne restera qu'à l'état de prototype unique.
Ce somptueux exemplaire, je l'avais déjà croisé au Bourget mais c'est toujours un grand plaisir que de redécouvrir cette version délicieusement kitschissime, j'en suis fou!