A Lyon...
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Charade Monza."
"
C'est l'histoire d'un mec..."
Le petit monde de l'automobile semble infini, j'ai beau faire un paquet de salons, je trouve toujours des voitures dont je n'ai jamais parlé. Que ce soit des versions rares de modèles connus et parfois d'illustres inconnues. Parmi ces dernières on a les concept-cars, les prototypes et les constructeurs sans patente.
Et voilà que dans les méandres des allées de Lyon je tombe face à l'une de ces bêtes curieuses, "mécékoidon"?? Sans logo ni non, à part un cartouche "PEUGEOT" à l'arrière rien, mais une plaquette nous indique qu'il s'agit d'une Charade Monza, tout un programme.
C'est une fois de plus le rêve d'un homme, un amoureux de l'automobile qui n'a qu'un rêve, voir naître sa propre voiture, la fabriquer et la proposer à des clients en réussissant à l'homologuer, le défi d'une vie tant la tâche est compliquée.
Pierre Foissotte n'est pas un amateur qui découvre le milieu, cet ingénieur Auvergnat à de la bouteille, il a travaillé pour les carburants "Esso" puis chez Renault pour la mise au point de monoplaces.
Fort de son expérience, il songe créer ses propres monoplaces mais en discutant avec ses contacts, il découvre une poignée de personnes voulant réaliser plus ambitieux encore, une voiture sportive de route.
Une petite équipe se forme autour du leader autour des années 1986, le projet prends corps et la direction sera celle d'un coupé 2 places dont le style devra être percutant sans être trop tapageur non plus.
Vu les coûts engendrés, la voiture sera vendue trop chère pour être distribuée en nombre, Pierre Foissotte reste réaliste et compte accoucher d'une dizaine de modèles.
Il faut donc s'allier à des sous traitants, nous ne sommes plus à l'ère des pionniers et la législation ainsi que les normes imposent une rigueur optimale, décrocher une homologation est un parcours du combattant. En France, personne n'est attiré par le projet, Foissotte essuie refus sur refus pour qu'une société lui moule les éléments de sa carrosserie qui sera faite de panneaux en matériaux composites. Du coup, c'est en Asie que s'oriente le groupe, celui qui a déjà dessiné les contours de la voiture est Japonnais, il à des contacts en Indonésie. Un industriel local fabricant en petite série accepte de produire les éléments de carrosserie, tandis qu'un autre, Japonnais se propose de faire les vitrages. On imagine pas que cet élément est l'un des plus compliqué à produire!
Nous sommes en 1989 et la voiture a si bien avancée qu'elle est enfin achevée. Le premier modèle va pouvoir enfin faire première apparition dans un salon privé de Clermont-Ferrand. Ça y est, officiellement la société "Charade Automobile SA" voit le jour, un moment d'émotion pour Foissotte.
La machine est lancée, une mini chaîne de production s'installe dans des locaux modestes, la voiture à maintenant un nom, Monza, tout un programme! Elle monte à la capitale, on la découvre au salon de la voiture de course à la fin de l'année 1989. On la découvre enfin même si ce n'est qu'une maquette échelle 1 sans motorisation et qui tient sur ses roues...avec des cales de bois! Le look est futuriste, enfin dans cette fin des années 80. L'avant est très Américain et évoque la Chevrolet Camaro où l'Alpine GTA. Les optiques sont fixes, la mode des phares "pop up" est terminée, ils sont placés derrière une glace qui a ici hélas disparue.
Le capot est assez imposant avec son bossage musclé au centre, le pare-brise fortement incliné mais c'st le travail sur les vitres qui surprends par son audace. On a vu sur quelques rares modèles ce type de travail, la De Lorean DMC12 mais je pense plus à la Subaru SVX. La partie haute des portières à la forme de boomerang est fixe, en bas une autre s'ouvre pour des raisons de commodité évidentes. C'est stylé mais il est vrai bien peu pratique dans les faits. Les rétroviseurs incorporés font aussi la part belle au look. Une vitre de custode triangulaire est mise derrière et un panneau de carrosserie incliné étire la voiture. C'est encore la mode des prises d'air de type "NACA", on en trouve justement à cet endroit mais aussi à l'arrière des bas de caisse. Ces derniers très hauts forment presque un ponton à enjamber. Peut être qu'au départ il était envisagé d'y mettre des portes papillon, une hypothèse personnelle.
L'arrière très géométrique semble avoir été réalisé avec moins d'imagination. Mais ce style un peu brutal semblait plaire car il fait penser au popotin des Aston Martin Virage qui sortiront l'année suivante. De là à dire que la firme Anglaise s'en est inspirée...peut être pas non plus. Notons aussi la lunette en léger retrait, ce qui était très Italien et déjà vu chez Ferrari, Lancia...et quelques années plus tard sur le coupé Peugeot 406.
Rien à voir à bord pour le moment, il faudra un peu patienter pour que les premiers modèles terminés et roulants voient le jour.
On finalise le projet et on reste hésitant sur la mécanique. C'est aussi là que l'on se rends compte que l'entreprise semblait hasardeuse car à ce moment on ne sais même pas quel sera le moteur...ni où il sera installé!
Ce sont des blocs Japonnais qui sont testés, Mitsubishi, Toyota et Honda...mais c'est le bloc de la Peugeot 205 GTi qui élu domicile à l'arrière! La déclinaison 1.9 litres de 130 chevaux est la mécanique qui propulsera la Monza. Mais on bricole encore et au denier moment le moteur passe à l'avant tandis qu'on décline une version à toit découvrable sous la forme de hard-top amovible. Sur cette version, des portes en élytre sont installées, tout le contraire de la Mercedes 300SL!
Les intéressés repartent avec la brochure...mais sans le bon de commande, la Charade Monza semble laisser dubitatif et sans doute que l'on craint que la société encaisse l'argent et ferme ses portes, elle semble bien fragile.
Les entrepôts déménagent à Brassac-Les-Mines et la société ne voit pas venir les clients, c'est un naufrage qui s'annonce. Pour sauver ce qui peut l'^tre, Foissotte modifie tout et va la vendre comme un kit car à l'Anglaise. On achète le lot de pièces à monter sois-même pour 42.850 francs...et on l'installe sur un châssis de Cox, triste fin. Il est quand même possible de s faire livrer un châssis tubulaire plus noble pouvant recevoir la mécanique de la 205 GTi, mais évidemment c'est plus cher. A 115.840 francs il était possible d'acheter la voiture (à moteur VW) entièrement montée.
On déménage une dernière fois les installations dans la Creuse mais la fin arrive en 1993 faute de clients. Ils seront une dizaine à avoir achetés cette automobile.
Plus amusant encore, le tout sera racheté par un entrepreneur Indonésien qui souhaite la perfectionner et aussi la distribuer en Australie. Elle se nomme maintenant Pawma Sport XL-300. Si la carrosserie est à quelques pièces près identique, le châssis est issu de la Mitsubishi L-300 et s'équipe d'un V6 3.8 litres (lui aussi signé Mitsubishi) et positionné à l'arrière. Désormais la finition est très soignée et l'intérieur luxueux est personnalisable. On peut opter pour 96 teintes de carrosseries et de nombreuses options. Vendue moins de 25.000$, c'est une affaire qui était très tentante. Je ne sais en revanche combien de Pawma Sport ont été vendues mais il était même possible de lui greffer après coup...un kit carrosserie de Ferrari F40!
C'est bien la version Française qui est exposée ici, une belle histoire d'homme et la preuve que l'on a toujours quelque chose à apprendre en matière d'automobile.