A Denver...
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Studebaker Gran Turismo Hawk."
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La retraite du faucon."
Ragaillardi par le succès rencontré avec l'arrivée en 1953 du tout nouveau coupé Champion dessiné par Raymond Loewy, Studebaker revoit ses ventes partir à la hausse. A South Bend, dans l'Indiana, on produit le joli et original coupé aux lignes Européennes en masse. Si les ventes restent éloignées des géants de Detroit, Studebaker se débrouille bien pour un constructeur encore indépendant.
Le coupé Champion plaît mais on sais que pour perdurer, il faut sans cesse le faire évoluer et offrir chaque année de véritables nouveautés. Studebaker n'a pas les moyens de lancer de nouveaux modèles en permanence mais à de l'imagination. Ainsi le coupé se voit décliné en de multiples variantes et versions tout en proposant une gamme d’équipement, d'accessoires et de coloris pouvant rendre quasiment unique chaque voiture.
C'est la marque Packard qui rejoint en 1954 Studebaker pour former un petit groupe automobile, cette union ne fera hélas pas leur force. Les coupés vont ensuite prendre l’appellation de Hawk, ils s'embourgeoisent, s'épaississent en s'engraissent par kilos de chromes. Si la ligne est en filigrane toujours semblable, certains la trouve dénaturée par ces excès et l'arrivée d'ailerons. Mais il faut recontextualiser, c'est la mode, les clients plébiscitent ces appendices et aujourd'hui ce côté "too much" participe au charme outrancier parfois des modèles de la série Hawk.
Mais au début des années 60 le vent tourne, le pic des ailerons de 1959 est retombé et on apaise le design. Studebaker doit s'adapter et travaille sur un nouveau coupé totalement différent et surtout beaucoup plus moderne, l'Avanti. On conserve la Hawk comme "roue de secours" en cas d'échec de sa remplaçante. Ainsi en 1962 la Gran Turismo Hawk fait figure de nouveauté.
Oh oui, tout ça sent le réchauffé et personne ne tombe dans le panneau, la Gran Turismo n'est qu'un restylage de la gamme Hawk et ne s'en cache pas puisqu'elle en conserve une partie de son nom. Brooks Stevens la redessine, l'homme est un designer de talent que peu connaissent, pourtant c'est lui qui va créer un peu plus tard l'extravagante marque Excalibur.
L'identité est ainsi préservée et on identifie sans ambages la série des Hawk. Toutefois l'emboutit de capot est modifié et surtout on découvre une calandre inédite copieusement pompée sur Mercedes! Les entourages chromés qui habillent les entrées d'air sous les optiques disparaissent, le coupé affiche une face avant nettement moins ostentatoire et personnellement je trouve qu'il lui manque un truc. Amusant quand même quand on sais à quoi ressembleront plus tard les Excalibur excessivement "bling bling"!
Si globalement la partie avant est ressemblante, la plus grosse modification concerne le dessin du pavillon. Adieu la lunette panoramique et son joli et fin retour de custode. Place à de gros éléments inclinés façon Ford Thunderbird. Studebaker réponds donc à la demande du public qui apprécie ces coupés bourgeois et massifs. Indéniablement, vue de profil, cette nouvelle version semble plus sage, un peu comme un homme qui prends de l'âge. La partie du toit laquée noir est un trompe l’œil, il ne s'agit pas d'un hard-top mais d'une nuance servant à alléger la ligne de la voiture. On pouvait opter pour du vinyle classique et même une version "plissée qui se révélera très fragile et se dégradera face aux intempéries et aux UV. Autre petite attention, le trait chromé qui part du haut des feux avant et qui souligne la caisse jusqu'au sommet des feux arrières.
Derrière c'est plus flagrant encore, les ailerons ont été rabotés et le couvercle de malle plat s'offre une grosse plaque en inox décorative pour le moins massive et je trouve assez lourde. Mais elle était présente sur la génération précédente aussi. On y trouve en dessous sur un bandeau noir l'inscription "STUDEBAKER HAWK". On y découvre aussi le macaron de la marque qui devient rond et prends nos couleurs nationales mains inversées, rouge/blanc/bleu. D'ailleurs on retrouve cette sorte d'étendard sur la calandre et les panneaux de portes avec ici un joli rappel stylisé en lettres dorés du patronyme de la voiture.
L'intérieur de cette GT huppée est assez sage mais bien réalisé. La planche de bord à l'instrumentation riche repose sur une platine en inox qui s'étire sur toute la longueur. Un bourrelet en simili au dessus assurait un rôle de protection en cas d'impact, disons qu'il limitait les blessures en réalité. Les habillages sont en revanche beaucoup plus sobres que par le passé, c'est chic et inspiré de l'école Européenne, dommage, j'aimais tant la déco kitsch des Hawk alors si tapageuses.
Faute de moyens, les dessous ont été sacrifiés et grosso modo on retrouve le châssis des premiers modèles remontant à 1953. Même chose sous le capot où le V8 maison est toujours à sa place. Le bloc de 4.7 litres 289 Ci qui délivrait en fonction de son carburateur entre 210 et 225 chevaux. Si la voiture se révélait agréable à conduire avec sa boite automatique, elle n'avait aucune prétention sportive et était une véritable grand tourisme comme l'indiquait son nom. Mais en 1963 elle s'offre des moteurs "Jet Thrust" dont le RV-8 était suralimenté. Trois versions étaient disponibles, la "R1" de 240 chevaux, la "R2" de 289 chevaux et la "R3" de 335 chevaux, la placide GT se transformait ainsi en véritable "muscle car"...mais la facture était douloureuse.
Le look évolue peu, seul quelques détails sont modifiés. C'est à bord que l'on trouve un peu plus de neuf avec des habillages en bois qui remplacent l'inox.
Mais en 1964, pour sa dernière année de production, on la modifie un peu plus. La calandre s'offre un "S" cerclé comme emblème, plus que jamais elle évoque Mercedes! Un faucon doré st fixé au centre, des modification peu onéreuses en somme mais que l'on voit. Les enjoliveurs de roues sont nouveau aussi mais de côté rien de franchement inédit. En revanche le couvercle de malle voit sa plaque décorative en inox retirée. Ce retrait à comme bienfait de la rendre à mon sens plus légère et élégante. On note l'apparition d'inscriptions sur le coffre et du chrome habille l'entourage de feux arrières.
A bord on a retiré au peu les boiseries apparues en 1963, seule la partie face au passager les conserve. La planche de bord est joliment dessinée et est de très belle facture. Le combiné d'instruments est riche et ses multiples cadrans ronds ainsi que le levier de vitesses au plancher copient l'influence Européenne. D'ailleurs pour un modèle en fin de vie, elle avait encore un joli pouvoir de séduction, les divers habillages étant très harmonieux je trouve.
Pour cet ultime millésime, les ventes n'ont pas été si mauvaise que l'on imagine, il s'en est vendu 63.810 modèles contre 92.465 pour la Ford Thunderbird.
Mais l'Avanti doit être le futur et la Gran Turismo Hawk achève la série ainsi.
Ce modèle est donc l'une d'elle et en comparant la rouge présentée hier, vous verrez quelques différence. Celle-ci est habillée d'une teinte "Laguna Blue Metallic" qui s'accorde parfaitement au choix des habillages intérieur dans une parfaite harmonie de couleurs.