A Retromobile...
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Ferrari 275 GTS."
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L'expatriée."
L'homme aux lunettes noires se serait bien passé de vendre des voitures de route, pour Enzo Ferrari, l'automobile, c'était uniquement pour la piste à la recherche permanente d'un podium. Mais voilà, pour faire courir ces voitures, il faut faire entrer de l'argent, pas de choix possible, Ferrari devra vendre des voitures particulières.
Ça ne lui plaît pas vraiment à Enzo mais il n'a guère le choix, et comme parfois ses puissants jouets se montrent capricieux, des clients aussi têtus que lui viennent se plaindre directement dans son bureau. Ferrucio Lamborghini se fâchera avec le commendatore mais lui sera encore plus rancunier, il va lancer sa propre marque pour lui montrer qu'il peut faire lui même beaucoup mieux! La suite, on la connaît tous.
Mais pourtant les Ferrari de route sont de sacrés monstres et la 250 un monstre sacré. Avec son légendaire V12 Colombo et ses multiples déclinaisons, la 250 va forger l'image de Ferrari, en quelques années la marque devient mythique grâce à elle, c'est la GT la plus désirable au monde.
Lancée en 1952, elle ne pourra être éternelle et au cours des années 60 il faut bien la renouveler. Lamborghini aura été un acteur de cette accélération, ses modèles étant maintenant de vraies rivales.
La 275 GTB est celle qui assure le relais en 1964. Elle y est dévoilée comme souvent au salon de Paris. Il s'agit d'un coupé dessiné par Pininfarina et d'allure très classique, elle possède d'ailleurs de nombreuses similitudes stylistiques avec la 250 et la confusion est légitime. D'ailleurs ceux qui ne sont pas spécialistes pourraient la confondre avec la fameuse 250 GTO.
Cette berlinette dessinée chez Pininfarina et assez cossue est assemblée chez Scaglietti dans un pur esprit GT. On y retrouve le désormais légendaire V12 "Colombo" dont la cylindrée est de 3286 Cc et qui affiche fièrement 280 chevaux, en 1964 c'est colossal. Il pouvait en extraire 300 avec l'adoption d'une rampe de carburateurs double corps spécifiques. Niveau architectural, cette 275 est la première Ferrari à s'équiper d'un système "transaxle", soit avec une boite de vitesses rejetée vers l'arrière et accolée au pont. Cette disposition optimisait la répartition des masses.
Cette GT à hautes performances autorisait des moyennes "canon" sur les autoroutes mais il était possible de s'offrir la version cabriolet GTS. Cette dernière un peu moins puissante était très appréciée par les clients de la côte ouest des USA. Cette décapotable à 2 place succède directement à la 250 GT SWB California Spider. Là encore c'est Pininfarina qui en trace les lignes mais dont le style est assez éloigné de la version coupé. D'ailleurs elle est assemblée chez Pininfarina et non chez Scaglietti contrairement au coupé. Les phares ronds ne sont pas disposés derrière une bulle de plexiglas, le pare-choc est muni d'une lame unique et les clignotants sont oblongs et associés aux veilleuses. A vrai dire quand on place l'une à côté de l'autre, on imagine pas un instant qu'elles sont des déclinaisons. Sur la version décapotable, les grilles d'évacuation d'air sur les ailes avant sont plus hautes et allongées alors que sur le coupé on retrouve une disposition similaire à la fameuse 250 GTO.
Toute la partie arrière est radicalement différente, la décapotable reprends le style Pininfarina de l'époque et dupliqué sur bien des modèles généralistes comme Fiat, Alfa Romeo où bien encore Peugeot et sa 404. Toutefois si la 250 GT Cabriolet était quasiment un clone de la 404, la 275 adopte un arrière plus raffiné et à mon sens plu réussi. La longe malle façon "os de seiche" est bien plus épurée sans l'ajout d'ailerons. Ici la rétine savoure un fessier allégé d'une jolie finesse, marrant, les feux font encore référence à Peugeot, ne vous font ils pas penser à ceux de la 204? Sous le joli pare-choc dépasse 4 sorties d'échappement, la base reste celle de la berlinette dont elle conserve le fabuleux V12.
Mais avant d'en parler, contemplons l'intérieur. Ferrari à franchi un palier et axe ses ventes vers les Etats-Unis. Présentation flatteuse façon grand tourisme, équipement complet pour l'époque, boiseries, cuir, détails soignés et habillages solides, c'est limpide, la 275 GTS est faite pour flâner le long de la côte ouest sur ces belles routes qui suivent le Pacifique.
Le moteur perds 20 chevaux et en affiche encore 260. Pesant 1270 kilos, elle peut toutefois atteindre les 240 Km/h, ce qui en 1964 est remarquable pour une décapotable.
Produite entre 1964 et 1966, Ferrari en vendra environ 200 exemplaires dont la grande majorité foulera le sol Américain. C'est le cas de celle-ci livrée neuve à New York en 1965. Elle présentait cette même configuration de couleurs, carrosserie "Oro Chiaro" et cuir "Rosso Scuro", à ces doux noms, ça sonne mieux que le black schwarz de chez Mercedes non! Le premier propriétaire sera Ed Hugus, un pilote automobile de chez Cunningham pilote à la "NART", la "North American Racing Team". La voiture changera plusieurs fois de propriétaires mais restera soignée avant de revenir en Europe au début des années 2000. Elle débarque en 2004 en Grande Bretagne avant de partir aux Pays bas, à croire que comme les retraités, elles voyagent plus une fois leur carrière terminée! Elle y sera restaurée en 2012. Récemment, elle aura droit à une petite remise en forme pour lui effacer quelques rides, une séance facturée 112.000€ quand même, une Ferrari ça s'assume!
Exposée sur un superbe stand riche en merveilles Italiennes, cette sublime pin up à la teinte originale et fort élégante m'a émerveillée. Le contemplatif que je suis est toujours comme un enfant dans un magasin de jouets mais avec la joie de ne pas être frustré de repartir les mains vide...et si c'était ça le bonheur.